1 Présentation des protagonistes.
Avant de rentrer dans l'arène présentons les protagonistes. A ma gauche Windows, un système d'exploitation apparu vers le milieu des années 80 et qui, à travers de nombreuses mutations a souvent changé de forme pour s'adapter au marché professionnel avec Win NT ou pour garder la pole position sur les systèmes grands publics avec W95 puis W98 et les suivants. A ma droite le challenger, LINUX, un système d'exploitation bien plus jeune puisqu'il date de 92 mais qui bénéficie dès sa naissance et par un simple effet de génétique d'une grande partie des avantages de UNIX, né en 1969, système qui lui a donné la vie. LINUX est un produit libre c'est à dire qu'il satisfait au quatre conditions qui définissetn un logiciel libre:- L'utilisateur peut l'installer et l'utiliser sur autant de poste de travail qu'il le souhaite
- Le code source est accessible à tout utilisateur
- Tout utilisateur peu corriger ou améliorer le code source
- La copie et plus largement la diffusion ne sont pas limités
2 La distribution LINUX
Précisons pour être complet que LINUX est souvent présenté sous forme de "Distribution" un terme qui peut être présenté comme un peu équivalent à "compilaton" en musique. Une distribution tout à fait courante contient sans problème de 2 à 3000 paquets, chaque paquet correspondant à un programme ou à une bibliothèque, en tout état de cause une nouvelle fonctionnalité du système. C'est ainsi que LINUX est généralement livré avec une foule de logiciels applicatifs parmi lesquels on trouve généralement au moins un serveur web, deux ou trois gestionnaires de bases de données (relationnels), encore plus de navigateurs, quelques logiciels de messagerie, au moins deux "pack office", quelques logiciels de traitement d'image et les applications multimédia classiques soit de quoi équiper confortablement le PC en logiciels d'application, tant pour une utilisation privée que professionnelle.Il convient de préciser que l'installation d'une distribution LINUX complète se fait généralement en moins d'une heure, ce qui est simplement un record compte tenu de la palette des applications qui sont généralement sélectionnées.
Bien sûr à ma gauche on trouve un éditeur capable de mettre en avant les mêmes fonctionnalités mais elles ne sont pas livrées avec le système d'exploitation et doivent faire l'objet d'un investissement additionnel. Quand à leur installation, ce sera bien sûr une opération par logiciel ou groupe de logiciel.
3 Comparaison des systèmes
Il est assez difficile de se faire une opinion fiable quand à la performance et aux mérites comparés des deux systèmes d'autant plus que les recherches sur Internet ou la lecture des articles de presse ne donnent que des éléments de réponse parcellaires. L'année 2002 a été très riche en communications sur le sujet. Une publication a eu l'effet d'une bombe, l'étude d'IDC concluant que Windows était, tout compte fait, moins cher à l'exploitation que LINUX, la différence pouvant être estimée entre 11 et 22%
.Cette allégation est d'autant plus curieuse qu'elle va à contre-courant d'études similaires conduites par des cabinets au moins aussi sérieux et qui arrivent très généralement à une conclusion inverse. Selon Robert Frances Groupes arrive à la conclusion que LINUX est globalement deux fois moins cher que le système concurrent, Cybersource chiffre quant à lui l'écart à 25
%
toujours en faveur de LINUX. Concernant le résultat curieux auquel arrive le premier cabinet cité il faut savoir que l'étude était commandée par ... Microsoft ce qui peut expliquer la conclusion.4 La note est "salée"
Je ne rentrerais pas plus avant dans l'analyse des publications et le débat d'expert. Il est évident que selon le type d'application choisie et la méthodologie adoptée on peut trouver des avantages à chacun des deux systèmes. C'est d'ailleurs en se plaçant dans un des ces cas particuliers qu'IDC est arrivé à une conclusion mathématiquement étayée, à défaut d'être parfaitement objective.Loin de ce débat je fonderais mon propos sur une autre approche, étayée elle aussi par un chiffre publié par IDC qui a dénombré près de 5 millions de PC vendus en France en 2002 répartis en 3.640 millions de PC bureautique, 1.170 millions de serveurs et 145 000 portables. Les acteurs dominants du marché du hardware sont dans l'ordre HP-COMPAQ, NEC, DELL, IBM et FUJITSU SIEMENS.
En soi le chiffre de cinq millions de machines réparties sur les tous les constructeurs de hardware du marché est impressionant. Si on prend maintenant en compte le fait que APPLE détient une part honorable mais objectivement marginale du marché, que LINUX, malgré une percée importante sur le secteur des serveurs représente encore une faible part des systèmes installés surtout en bureautique ou en utilisation domestique il vient que le grand gagnant de ces ventes est l'éditeur qui fournit tous les constructeurs de matériels en softs ! Chaque PC vendu en France est vendu avec une licence, généralement OEM, d'un des systèmes d'exploitation édités à Redmond. De très rares unités échappent à cette règle. Certains assembleurs acceptent de vendre une machine sans système d'exploitation en sachant parfaitement que l'acheteur a peu de chance de faire partie des cette minorité amusante qui utilise LINUX et que le plus souvent il va se dépêcher d'installer une copie illicite.
Ne perdons par ailleurs pas de vue que tous les constructeurs et les vendeurs de matériels sont soumis de la part de la firme de Redmond à une forte pression pour que soit inclue une licence OEM avec chaque machine vendue. Au point d'ailleurs qu'il arrive qu'on entende dire que la vente d'un PC sans système d'exploitation est impossible, voir même illégale ! Un comble quand on sait que c'est justement la vente forcée d'un système d'exploitation qui est purement et simplement illégale. Nous avons abordé ici le système d'exploitation. Mais avec un système d'exploitation, au sens strict de ce terme, on ne fait pas grand chose. Et le système de Redmond est justement un système d'exploitation au sens strict. Il faut donc ajouter un traitement de texte, un tableur, parfois un gestionnaire de bases de données etc. Rapportez cette liste de commission à la masse des machines concernées et, même en tenant compte du fait que les Français sont certainement bien classés sur le taux de piratage, il vient un montant qui ne déparerait pas à côté des chiffres qui constituent les comptes de la nation. N'oublions surtout pas que cette somme est versée par la communauté nationale à un éditeur de logiciel étranger. Il n'est pas besoin de s'étonner, dans ces conditions, que le patron de la boutique détienne la plus grosse fortune du Globe, que les profits de la société rappellent des chiffres qu'on ne rencontre généralement qu'au lendemain d'une élection, de préférence dans une république bananière !
Un passage à LINUX permettrait, pour chaque machine convertie au système alternatif, l'économie de plusieurs centaines d'Euros. A l'échelle de la communauté nationale l'économie se chiffrerait en centaines de millions d'Euros !
Mais alors me direz vous, si la démonstration est aussi parfaite, pourquoi le mouvement n'est-il pas plus engagé ?
5 Les résistances au changement.
Je suis assez tenté de dire que la résistance au changement est l'un des facteurs essentiels qui explique la faible pénétration de LINUX, tant au niveau de l'utilisation individuelle que des entreprises. Les Directions Générales ne sont peut-être pas encore assez conscientes du potentiel d'économies possibles. De leur côté les Directions Informatiques n'ont certainement pas cherché, pour partie d'entre elles, à s'aventurer dans une direction non orthodoxe. Qu'un réseau motorisé par un système d'exploitation majeur vienne a s'effondrer et on dira "défaut connu, on reboot on nettoie et ça repart". Qu'un réseau basé sur un système libre type LINUX ou BSD vienne à subir le même avatar et le Directeur Informatique aura du mal à expliquer à une DG agacée le bien fondé du choix d'une alternative au leader bien connu.La résistance est toutefois en train de faiblir. Selon une étude récente publiée dans "La Tribune" le 27 mars 2003 50
%
des entreprises clientes Microsoft envisageraient de passer à LINUX sur les serveurs dans les 12 prochains mois. Pour la bureautique le mouvement est moins net mais ne fera que s'amplifier au fil du temps. Déjà certains grands corps de l'état sont passés à LINUX. L'éducation Nationale a un plan de passage progressif aux logiciels libres. Toutes ces lézardes vont peu à peu fissurer la forteresse de Redmond et aboutir à un partage du marché.5.1 Loin d'une vision angélique
Ne voyez pas dans mon propos l'affirmation que le passage aux logiciels libres, à LINUX en particulier, sera sans douleur ni efforts. Je fais partie de ceux qui ont pris le train en route il y a déjà quelques années. Je mesure donc bien, à l'aune du chemin parcouru, la distance qui reste à franchir pour faire de LINUX le challenger reconnu du système établi.N'oublions pas enfin, que sauf dans les familles qui ont préféré APPLE et celles, peu nombreuses, qui sont déjà passées à LINUX, les enfants sont élevés depuis leur plus jeune âge à l'usage du cliquaudrôme de Redmond. Cette culture informatique est ensuite (bientôt on pourra dire "était") nourrie du passage à l'école, au lycée, suivi éventuellement d'études supérieures dans une grande école ou une université.
5.2 Piratage et menu fretin
Avez vous déjà réfléchi que nos établissements scolaires étaient certainement les pires repères de pirates qui puissent exister ? Et qui se souvient d'avoir entendu parler d'un contrôle des licences dans une école ou une citée universitaire ? Pour ma part je ne garde pas le souvenir d'une information de ce genre alors que j'entends ou lis régulièrement des messages adressés aux entreprises par le BSA et qui insistent sur la nécessité d'être en règle en cas de contrôle. Effet du hasard ou simple manque d'intérêt pour le menu fretin ? Difficile à dire. Pour ma part j'ai une autre explication bien moins brillante. Nos enfants sont, dès le sevrage, vaccinés à la marque de Redmond, élevés ensuite à la même potion. On les laisse enfin libres de se former sur les logiciels qu'ils auront piraté après quoi ils débarqueront en entreprise avec un CV qui précisera qu'il savent couramment utiliser tel traitement de texte bien connu ou tel tableur présenté comme incontournable. La tentation de l'employeur est alors forte d'utiliser directement ses compétences en mettant à disposition, cette fois espérons le avec les licences nécessaires, les mêmes logiciels.6 L'argent qui ne traversera pas les frontières sera investi en formation.
Un changement complet des mentalités, une refonte de la façon de voir les choses serait pourtant tellement profitables. Plutôt que d'investir une fortune en licences, pourquoi ne pas utiliser ces sommes pour faire de la formation ?Oh bien sûr les stagiaires auraient des surprises. Ils découvriraient par exemple qu'on peut très bien faire du courrier au format pdf, un format exploitable par tous les systèmes informatiques qui se respectent, que le format xml est parfait pour stocker les informations d'un tableur. Ils découvriraient certainement aussi, et c'est certainement un des aspects les plus intéressants, qu'un tableur doit servir à faire du calcul et non du traitement de texte, que les données organisées sont tout aussi bien rangées et exploitées via un gestionnaire de bases de données et accessoirement, que la ligne de commande demeure le moyen le plus efficace d'obtenir quelque chose de précis de l'ordinateur. En un mot les stagiaires découvriraient une approche différente, plus informatique, plus performante.
Évidemment, il va sans dire que le passage à LINUX devra comporter les passerelles qui permettrons de récupérer le travail qui a déjà été réalisé, de faire une mise à jour éventuelle de celui-ci et d'en faire une nouvelle version. Soyez rassurés, il y a bien longtemps que les distributions courantes offres des outils qui permettrons à l'utilisateur de récupérer ses anciens fichiers. Il pourra même conserver ses habitudes, les bonnes et les mauvaises.
7 Ma conclusion
7.1 Améliorer le niveau général de connaissance
Une étude économique comparant les deux systèmes est à mon sens relativement illusoire. Par contre il est évident qu'une refonte des habitudes et un investissement massif dans la formation des sommes économisées sur l'achat de licences ne peut que conduire à une amélioration générale et très bénéfique des connaissances des utilisateurs. C'est certainement, du moins pour le domaine de l'utilisation bureautique, le principal apport potentiel à attendre de LINUX.7.2 Un article iconoclaste ?
Mon propos paraîtra certainement iconoclaste. Certes, j'ai à certains endroits forcé le trait. Ne pensez pas toutefois que je fasse de l'anti Redmond primaire et viscéral. Je pratique ce système tous les jours au travail. Puis rentré chez moi je me mets devant ma Linuxette pour mes activités privées. Je suis donc très bien placé pour faire une comparaison objective des deux systèmes. Un comparaison qui me fait dire aujourd'hui que 95%
des objections qui pourraient être faites à l'adoption de LINUX ne résistent pas à un examen attentif et à une démonstration convaincante. Le seul domaine dans lequel le retard de LINUX est évident est celui des jeux PC. Ces produits ne relèvent toutefois, à mon sens, pas de l'informatique.
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